Nuées Célestes Vierges de Concepts
Les Nuées Célestes Vierges de Concepts (rTog med nam mkha’ sprin phung) རྟོག་མེད་ནམ་མཁའ་སྤྲིན་ཕུང་།
Signification littérale
—rtog: concept; —med: sans; —nam mkha’: ciel, céleste; —sprin phung: nuées (amoncelées).
Définition
Ce texte appartient au corpus dit de La Trilogie des Nuées Amoncelées (sPrin phung skor gsum) du Lama Yangtik (Bla ma yang tig) de Longchenpa et est consacré à la clarification des principes de la Vue (lta ba), de la Méditation (sgom pa), de la Conduite (spyod pa), et du Fruit (‘bras bu).
La Vue est celle de la Vacuité-Clarté (stong gsal), c’est-à-dire de la Sagesse Née-d'elle-même (rang byung gi ye shes), transcendant les dualités telles que le bien et le mal, les acceptations et les rejets, les espoirs et les craintes, les chutes dans des extrêmes ou des partialités, etc.
La pratique de la Méditation repose sur les points-clefs du corps, de la parole, et de l’esprit. L’application concrète de ces points-clefs permet à l’adepte de :
- reconnaître son propre état naturel ;
- demeurer dans cet état ;
- décider directement que cet état est tel qu’il l’a réalisé (c’est-à-dire qu’il n’est pas autre chose que la Vacuité-Clarté initialement comprise avec la reconnaissance de l’état naturel) ;
- jouir du bénéfice que cela apporte à son esprit (en chassant les doutes, les proliférations, etc.) ;
- maîtriser cette reconnaissance grâce à sa ré-évocation (dran pa) régulière ;
- ne pas se laisser emporter par les mouvements discursifs ; et
- concrétiser ou rendre effectivement manifeste la réalisation indéfectible de cet état.
Ainsi, si l’adepte ne reconnaît pas sa propre nature, il ne pourra éradiquer les terrains d'égarement et se défaire de ses obscurcissements. S’il ne demeure pas dans cet état, sa reconnaissance sera emportée par les circonstances (autrement dit, elle fluctuera en fonction des circonstances). S’il ne décide pas que cet état est tel qu’il l’a réalisé, il continuera à se perdre dans les proliférations en se demandant si l’état naturel est bien tel ou tel, etc. Si cette reconnaissance n’apporte aucun bienfait à son esprit, il demeurera comme une personne ordinaire (impliquant en cela que la reconnaissance véritable le distingue automatiquement du commun). S’il ne maîtrise pas cette reconnaissance à l’aide de ré-évocations régulières, il sera constamment en proie au quintuple et triple poisons (comme les gens ordinaires). S’il se laisse emporter par la discursivité, l’adepte continuera à être soumis à ses passions. Enfin, s’il ne concrétise pas cette reconnaissance de manière manifeste, il déviera dans les distractions des personnes ordinaires.
La Conduite à adopter lorsque l’on médite en progressant de la sorte est, au cours de l’Accès-à-l'Egalité (mnyam bzhag), de demeurer dans une condition en laquelle on ne privilégie rien, autrement dit on demeure sans acceptation ni rejet, en laissant les six associations de consciences parfaitement relaxées, sans attachement ni crainte. Ainsi, au cours de l’Après-Obtention (rjes thob), tout ce à quoi l’on sera confronté sera naturellement libéré dans une émergence naturelle exempte de partialités.
Le Fruit se traduit quant à lui par la réalisation indéfectible du Corps Absolu (chos sku), c’est-à-dire du Discernement-Vacuité (rig stong). Au sein de cet état on réalise les diverses modalités de la Liberté (grol ba), à savoir la Liberté originelle (ye grol), la Liberté naturelle (rang g rol), la Liberté intégrale (yongs grol), etc. Au sein de ces modalités, notre esprit (rang sems) se libère alors en l’état du Plein Eveil (sangs rgyas).
Le texte fut rédigé par Longchenpa sur les flancs du Mont Gangri Thökar.
Jean-Luc Achard 21 avril 2023 à 10:59 (CEST)