Liberté directe
Liberté directe (cer grol) ཅེར་གྲོལ།
Signification littérale
— cer : direct ; —grol : liberté, libération.
Définition
La notion de “liberté directe” renvoie au processus quasi-instantané de libération qui s’effectue lorsque l’on perçoit les phénomènes et que toute saisie est directement ou instantanément libérée sans laisser aucune trace. Selon le Trésor du Véhicule Suprême de Longchenpa, ce concept n’existe pas dans les Sūtras ni les Tantras, mais uniquement dans le Dzogchen. Ce mode de libération consiste dans le fait que les perceptions sont directement libérées dès qu’un contact sensoriel est effectué avec un objet.
Explication détaillée
Dans ce contexte, cela signifie qu’en pratique l’adepte s’exerce à ne pas transformer ses perceptions avec son esprit ordinaire ou à éradiquer ses perceptions. Il laisse le processus de contact sensoriel se dérouler sans tenter de l’altérer d’une manière ou d’une autre. Concrètement, il demeure dans l’état du miroir qui a le potentiel de laisser se refléter toutes sortes de choses sans être affecté ou altéré par la nature de ces reflets. De cette manière, ses perceptions sont automatiquement libérées dans leur propre pureté naturelle.
En un premier instant, tel que celui de la perception visuelle d’un objet, ou de l’audition d’un son, etc., le fait de demeurer dans l’état du Discernement (rig pa) permet à l’adepte de percevoir sans proliférer et donc de libérer ses perceptions des projections subjectives du mental ordinaire. Dans un contexte totalement centré sur la pratique avancée de la Grande Perfection, ce phénomène de libération directe est précisément ce qui se déroule lorsque l’on contemple la Vision de la Réalité Manifeste (chos nyid mngon sum gyi snang ba) : les splendeurs quinticolores qui s’élèvent au cours de cette vision ne sont pas des objets sensoriels mais l’expression du dynamisme de notre propre Discernement. De ce fait, lorsqu’on les contemple, l’Esprit reste dans le mode du Discernement (rig pa’i tshul), c’est-à-dire qu’il n’est pas entravé par des projections continuellement perdues dans un flot de jugements et d’évaluations subjectives.
Ce processus de libération est instantané mais il peut être découpé en plusieurs phases qui se déroulent en une fraction de claquement de doigts. Il y a ainsi tout d’abord une perception dont l’objet est clairement reconnu (un vase par exemple) ; cette reconnaissance est instantanément établie (en sorte que le vase n’est pas perçu comme une fleur, etc.) ; elle est ensuite pareillement libérée sans aucun effort et sans qu’il n’en reste la moindre trace (de la même manière qu’un miroir ne retiens pas les traces des reflets apparaissant à sa surface).
Jean-Luc Achard 12 mars 2025 à 13:42 (CET)